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Corps de style, entre Brésil et France…

Incorporant subtilement le corps dans les musées autour du monde, le jeune photographe français Julien Spiewak nous surprend avec un regard contemporain sur des environnements historiques. Ce qui pourrait ressembler à un jeu de cache-cache, jouant avec notre regard curieux sur les détails des corps dans les espaces, se révèle être un essai subtil et profond. L’élégance des mouvements – des bras des chaises et des mannequins, par exemple – unit deux moments dans le temps, donnant vie à l’histoire. La performance des corps nus permet au photographe de ne pas capturer un instant fugace mais de relier des époques, des styles et des moments historiques.

En introduisant la vivacité du corps humain, toujours découpé, dans des pièces anciennes, chargées d’histoires, souvent rigides et austères, Julien provoque l’étrangeté. Entre photographie in situ et performance, il produit une rupture dans nos esprits, en brisant la référence muséale, qui nous rapproche de l’art ancien, du mobilier baroque et des tapisseries entreposées. Plus encore, nous nous connectons à ces objets d’une manière familière. On assiste à une désacralisation des musées et à l’ouverture d’un dialogue entre les générations. En cherchant du regard où la partie du corps est cachée dans l’image, nous nous arrêtons et observons. De manière ludique, le photographe nous fait découvrir de riches détails qui nous conduisent à une interaction avec l’histoire du musée, les peintures, ainsi qu’avec notre propre récit.

Julien travaille sur sa série « Corps de Style » depuis 2005, dans des musées français, européens et brésiliens ainsi que dans des collections privées. Ses images sont soigneusement étudiées et réfléchies. Une attention particulière est portée aux formes, aux matériaux et bien sûr à l’histoire de chaque musée. Entre la première visite et le jour de la prise de vue, Julien observe chaque courbe et chaque symbole, photographie tout et fait des croquis des différentes possibilités de composition finale. Dans son processus de création, l’artiste trouve peu à peu des ouvertures entre le musée et son univers particulier. Et tous les détails sont valables, y compris les légendes qui, avec un certain humour, répertorient tout ce qui est présent dans l’image, qu’il s’agisse des œuvres, du mobilier ou de la maquette elle-même.

Pour son exposition virtuelle lors de FotoRio 2020, nous présentons deux salles avec des images de musées brésiliens et français qui dialoguent entre elles. Ainsi qu’une série d’études qui montrent son processus créatif. En vacances au Brésil en 2015, l’artiste a photographié le Musée Impérial, à Petrópolis, et le Musée de la République, au Catete. Deux monuments de l’histoire du Brésil qui renferment de nombreux souvenirs importants de périodes remarquables de la formation du peuple brésilien. Nous montrerons des images de France provenant de collections privées et des musées « De la vie Romantique », « De la Chasse et de la Nature » et « Cognacq-Jay ». 

Toutes les images constituent des scénarios somptueux et classiques, presque délirants. Les détails légers, délicats et gracieux des corps de Julien, bien que pratiquement en symbiose avec les décors, rompent avec le délire d’une époque et nous ramènent au présent.

Ioanna Mello 

http://photolimits.com